PATRICE BALVAY - 26 JUIN 2016

Il est interdit de photographier le Kannon d'Hasedera. Je me souviens de cette pluie ascendante d'or et d'argent.

Sans doute pour mon dernier dessin, je vais réutiliser le "rainbow" Mitsubishi, ce crayon à la mine très cassante, d'un bleu profond, qui peut se travailler à la gomme.

Un travail très long et très ingrat pour un effet quasi pictural.

Je dois montrer mon travail à l'Institut français. Imamura-san me propose d'occuper la totalité du rez-de-chaussée pour cela.

Je profite du dimanche pour faire une performance sur le Nihonbashi, le point de départ de mon travail de dessin. J'ai tracé une ligne à la craie en faisant un aller et un retour sur le pont, en passant par le zero milestone. Les trottoirs et les routes sont tellement propres que je pensais m'exposer à des regards réprobateurs. Bien au contraire, les passants ont tous été attentionnés et curieux. Le policier dans son koban n'a pas bougé. Bettina a pris des photos de cet ultime dessin.

C'est en achetant une estampe d'Atagawa Hiroshige de la série des Cent vues d'Edo que j'ai constaté qu’il s'était servi du Nihonbashi comme fil conducteur de sa série, qui s'étale sur quatre saisons. Je l'ai peut-être su pour mieux l'oublier.

En accrochant tous mes dessins, je décompte qu'en 5 semaines de travail effectif j'ai réalisé 16 grands dessins.

Mamoru Inoue, mon meilleur spectateur.

Qui a toujours de petites attentions.

Et m'offrira un extraordinaire crayon le dernier jour où je le verrais.

La fin de mon travail de dessin arrive brusquement. J'ai intensément marché et dessiné. J'ai puisé en moi une très grande liberté pour dessiner. J'ai jeté toute idée de cohérence pour aller vers quelque chose d'inattendu. Catherine Miki avec qui j'ai correspondu pendant tout ce séjour, me dit que le zen revient à tout oublier, repartir de zéro, rejeter absolument toute répétition, toute idée de style. Elle trouve étonnant, que sans le savoir ni le préméditer, c'est une posture que j'ai adoptée.

Tout se précipite. Je quitte la résidence demain. Isao, un peintre m'héberge dans son atelier à l'ouest de Shinjuku, où je n'aurais plus d'internet, avant mon vol de Narita.

Forcément il fallait finir sur de l'inachevé.

Mon cher Lucas, ce voyage t'était dédié. Je te remercie pour tous les signes que tu m'as envoyés. Tous les dessins que je pourrais faire je les fais pour toi ; je sais que tu les vois.

Isao, un peintre rencontré me propose de m'héberger dans son atelier pour trois jours, à l'ouest de Shinjuku.

Sans connection je vais devenir silencieux.

Kaoru me fait remarquer qu'en dessin, comme dans la vie, rien ne s'efface.

Ne pas oublier demain de remettre les clefs à Minami.

 

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